Monet, qui s’est installé depuis quelques temps à Giverny avec Alice Hoschedé et leurs enfants, acquiert en 1893 un terrain à proximité de sa maison. Grâce au détournement de l’Epte, il peut créer quelques mois plus tard un jardin d’eau qu’il fait planter de toutes sortes de plantes aquatiques.
À une extrémité du bassin, un pont japonais clôt la perspective. L’eau et les multiples reflets qu’elle offre au regard, le pont et les nénuphars de diverses couleurs qui se déplacent au gré de l’onde seront le sujet de quelques toiles qu’il présente dans la galerie de son marchand, Durand-Ruel, en 1899. Inlassablement, jusqu’à la fin de sa vie, il reviendra à ce thème dans une sorte de communion panthéiste qui l’isole des conflits et des soucis qui vont assaillir ses vieux jours.
Ces premiers tableaux des Nymphéas renvoient au japonisme, qui depuis près de trente ans avait déferlé sur l’art européen, et dont Monet avait été un adepte précoce. En effet, en 1867, il avait peint la Terrasse à Sainte-Adresse en transposant l’estampe de Hokusai intitulée le Pavillon de Sazai du temple des Cinq cents Rakan (1829-1833).
Le relèvement de la ligne d’horizon, l’asymétrie de la composition et les grands aplats de couleurs figurent parmi les emprunts les plus courants qu’il fera aux estampes japonaises.
Depuis plusieurs dizaines d’années, quelques boutiques parisiennes diffusaient ces œuvres auprès de nombreux amateurs, dont Monet. Dans des formats divers et selon des dominantes colorées variées, ce dernier va peindre de nombreuses variations sur ce thème, en fonction des saisons et des heures du jour.